Le train arriva avec plus d’une demi-heure de retard. Forcément, je n’arriverais pas à l’heure à mon rendez-vous. Je me devais d’être à 14h30 à Dijon pour recevoir les clés de mon nouvel appartement dans lequel je séjournerais pendant quelques mois, le temps d’écrire un article pour le journal pour lequel je travaille. Il m’est demandé d’enquêter sur une usine qui fabrique de la moutarde et qui est suspectée d’utiliser des produits non autorisés dans la production de la sauce. C’est là un sujet tellement passionnant que personne à la rédaction ne voulait le prendre. C’est donc moi qui dois m’y coller, étant donné que, comme je suis la dernière arrivée au bureau, je me retrouve avec tous les sujets dont personne ne veut...
Une fois montée dans le train, je pris place sur un siège et allumai mon ordinateur. J’en avais pour 3 heures de trajet, autant que je mette mon temps à profit. Je commençai par envoyer un mail au propriétaire de l’immeuble dans lequel j’allais loger pour le prévenir de mon retard.
Au bout d’à peu près 1 heure, j’éteignis mon portable et laissai mon esprit divaguer en regardant le paysage défiler à travers la fenêtre. Mes yeux commencèrent à se fermer.
Je me réveillai en sursaut lorsque j’entendis le conducteur du train crier “Terminus ! Tout le monde descend !”. Je me dépêchai de prendre ma valise, mon sac de travail et mon sac à main, et sortis sans manquer de dire au revoir au conducteur. Quand je fus sur le quai, je regardai autour de moi, en espérant voir un panneau qui m’indiquerait où aller. Tout ce que je vis, c’est mon reflet dans une vitrine d’un magasin de la gare, et je me rendis compte que mon chignon était complètement défait. Je me dirigeai donc vers un bistrot, entrai, et allai dans les toilettes afin de me recoiffer. Ensuite, je regardai l’heure : 15h05. Oups... Dans mon mail, j’avais écrit que j’aurais “seulement” une demi-heure de retard (comme le train, en somme). Je sortis en toute vitesse et je demandai au serveur du bistrot de m’indiquer par où je devais me diriger en lui donnant l’adresse à laquelle je devais me rendre. Il me renseigna gentiment. Je le remerciai et m’en allai, en marchant le plus vite possible, afin d’essayer de ne pas avoir de retard supplémentaire.
J’arrivai peu après 15h15. Je déteste le retard, mais là, ce n’était pas ma faute. Je trouvai le bâtiment avec facilité. Il n’avait pas l’air très neuf, mais il ne faut pas se fier à la façade, car peut-être (je l'espérais) que l’intérieur serait en meilleur état. Je sonnai, et une voix retentit dans le parlophone.
- C’est pourquoi ?
- Euh... Bonjour, je suis Louise Damstrèl, et je viens pour avoir les clés de mon appartement... J’ai rendez-vous...
- Très bien, vous pouvez entrer, la porte est ouverte.
- Merci...
J’ouvrai donc la porte et entrai. Un homme (que je devinai être le propriétaire des lieux et la voix que j'avais entendue) s’avança vers moi.
- Bonjour Mademoiselle Damstrèl. Je suis Edgar Fichole, le propriétaire.
- Bonjour, euh... Excusez-moi pour le retard, c’est à cause de mon train,...
- Pas de soucis, ne vous en faites pas.
Il m’adressa un léger sourire.
- Voici votre clé, me dit-il en me donnant une vieille clé un peu rouillée.Venez, je vais vous faire visiter.
- Merci...
- Tout d’abord, voici votre boîte aux lettres, me dit-il en me montrant le mur de gauche. Vous avez le numéro 15.
Nous nous dirigeâmes ensuite vers l’escalier.
- Vous séjournerez au troisième étage, m’informa Monsieur Fichole.
- Euh... Est-ce qu’on ne pourrait pas prendre l’ascenseur, alors ? demandai-je.
Je venais de me taper 3 heures de train et une marche intensive, et lui, il voulait encore plus m’achever avec une montée de 3 étages.
- Il n’y a pas d’ascenseur dans cet immeuble.
- Quoi !?
Il me dévisagea.
- Ce... Ce n’est pas grave, bredouillai-je. C’est juste que je suis un peu fatiguée après le long trajet que je viens de faire.
Il n’ajouta rien, et commença à monter. Je lui emboîtai le pas.
Lorsque nous arrivâmes au troisième étage, je n’avais quasiment plus de souffle. Monsieur Fichole ouvrit la porte avec difficulté, et me fit entrer dans l’appartement... Enfin, si on peut appeler ça un appartement ; ça ressemblait plus à un grand studio.
- Voilà la cuisine, la salle-de-bain, et le petit salon / salle-à-manger. Et ici, il y a votre chambre.
J’entrai dans cette-dernière et baladai mon regard un peu partout. Tout me sembla normal, jusqu’à ce que j’aperçoive une substance liquide d’une couleur vert olive. Je m’abaissai pour observer un peu mieux la goutte qui jonchait le sol.
- Quelque chose ne va pas ? demanda Fichole.
- Qu’est-ce que c’est ? demandai-je à mon tour en lui montrant ce que j’observais.
Il s’abaissa à son tour pour regarder le sol.
- Oh ! Ça, c'est juste une tâche laissée par l’ancien locataire. Ne vous en faites pas !
Il prit son mouchoir de poche et essuya la “tache”. J'esquissai une moue dégoûtée.
- Vous êtes sûr que ça ne vient pas du plafond ? demandais-je, peu rassurée.
Il étouffa un rire.
- Ne vous inquiétez pas Mademoiselle ! Le plafond est de bonne qualité et aucune infiltration n’a eu lieu.
- Hum... D’accord, si vous le dites…
J’étais très peu convaincue, mais je n’insistai pas, et laissai le propriétaire partir.
La chambre n’était pas très accueillante ; elle était froide et sans vie. On aurait dit que personne n’y avait séjourné depuis un bon moment. Je pris soin de changer les draps du lit et d’y déposer mon oreiller. Je commençai ensuite à déballer et ranger mes affaires. Quand j'eus fini, je pris mon sac à main et sortis pour aller faire quelques courses.
Lorsque je fus revenue et que j’eus rangé mes achats, je préparai mon repas et mangeai. Je regardai ensuite un peu la télévision, mais j’allai me coucher tôt, car cette journée m’avait complètement éreintée et je ne m’attendais pas à ce que celle de demain soit différente. J’entrai donc dans ma chambre et mon regard se dirigea presque automatiquement vers l’endroit où j’avais vu la “tache” sur le sol. Une autre goutte de l’étrange substance s’y trouvait encore ! J’étais pourtant sûre d’avoir vu Fichole l'essuyer... Je pris un mouchoir usagé et l’essuyai avec précaution. Je pouvais sentir à travers le papier la texture de ce qui se trouvait dans le mouchoir. Ça me répugnait. Je jetai immédiatement le papier et ce qu’il contenait à la poubelle.
J’eus moins de mal à m’endormir que ce que je croyais. J’étais tellement fatiguée après ma journée de voyage que les gouttes au-sol ne m'empêchèrent pas de dormir.
Le lendemain, je dus commencer mon enquête pour mon article. Le sujet ne m'intéressait vraiment pas, mais comme j’aime mon travail de journaliste, j’eus quand même la motivation de me lever et d’aller travailler.
En me levant, je regardai par terre et ne vit pas de tache. Une vague de soulagement me traversa. Seulement, une fois que je fus prête à partir, j’entrai de nouveau dans ma chambre pour prendre mon sac de travail et là, je vis qu’une autre goutte jonchait le sol. La panique s'empara de moi, mais je me résonnai et me dis que c’était ridicule de m’inquiéter pour une telle banalité. Je pouvais également demander pour changer d’appartement... ce que je ne fis pas. Ce n’était quand même pas une petite tache verte qui allait m’effrayer. J’informai tout de même Fichole de l’état des lieux, mais il me répondit de ne pas m’inquiéter.
Je rentrai “chez moi” aux alentours de 18h30. Je n’ai pas pour habitude de travailler jusqu’à cette heure-là, mais je voulais absolument terminer la partie que j’étais en train de rédiger. Quand j’entrai dans mon appartement, j'allai directement voir dans ma chambre. Une nouvelle goutte au sol. J’étais découragée. J’en avais surtout marre de toujours essuyer ces drôles de taches. J’essayai de ne plus penser à ça le reste de la soirée.
Lorsque j’allai dormir (aux environs de 22h00), je passai d’abord ma tête par l’encadrement de la porte de ma chambre avant de passer à la salle-de-bain. Il n’y avait rien sur le sol. Après m’être brossée les dents, je me dirigeai dans la pièce d’à côté, mais cette fois-ci non plus, je ne vis pas une goutte par terre : j’en vis 3 ! La peur s'empara de moi. Je respirai profondément et allai me coucher (après avoir une nouvelle fois essuyé le sol). Je ne dormis pas très bien.
Aux environs de 3h00 du matin, j’ouvris les yeux. Je venais en effet de sentir quelque chose de tiède me tomber sur le visage. J’approchai délicatement mes doigts de ce-dernier, et touchai prudemment ce qui se trouvait sur mon nez et sur mon philtrum. La substance était visqueuse et collante. Beurk ! Je n’eus pas le temps de me lever qu’une autre goutte me tomba sur la figure, cette fois-ci sur la joue droite. Je me levai si vite que j’en eus la tête qui tournait. Je courus vers la salle de bain, fis couler l’eau du robinet abondamment et frottai mon visage sans ménagement. Je ne retournai pas dans ma chambre ; j’étais bien trop dégoutée et effrayée pour dormir à nouveau dans mon lit. Je me couchai dans le sofa du salon et m’endormis vers 5h30 du matin.
À 7h00, mon réveil sonna. J’étais tellement fatiguée à cause de ma mauvaise nuit, que je décidai de dormir encore 5 petites minutes. Et puis encore 5 autres, et puis... Je me réveillai en sursaut en pensant “je vais être en retard !”. Je regardai l’heure : 7h45. Non, je n'allais pas être en retard ; j’étais en retard ! Je me préparai en vitesse et arrivai au travail plus tard que prévu. J’aurais voulu bouger mon lit de place, mais je n’avais pas le temps.
Ce soir-là, je déplacai mon lit comme je l’avais prévu. Il était mis parallèlement au mur de la porte. Je le tournai donc dans l’autre sens, pour qu’il soit face au mur de la porte. De sorte que je ne reçoive plus de goutte pendant mon sommeil.
Je ne dormis pas mieux que la nuit précédente. Aux environs de minuit, je me réveillai. Une autre de ces gouttes vertes me tomba dessus. Sur les pieds cette-fois. Heureusement que j’avais la couverture sur moi (cela m’évita un nouveau contact direct avec la substance). Un frisson me parcourut le corps. Je regardai au plafond. Forcément, la nuit avait plongé la chambre dans la pénombre et je ne pouvais donc rien voir de ce qui se trouvait au-dessus de ma tête. Au bout de quelques minutes, je crus apercevoir 2 grosses “sphères” ovoïdes et jaunes. Mon regard devint plus intense et je vis qu’à l’intérieur des sphères, il y avait 2 points noirs parsemés de reflets oranges. Je fus prise de panique et mes mains devinrent moites. Je fermai les yeux et quand je les réouvris, le plafond était redevenu noir. Je reçus une nouvelle goutte, suivie d’une autre peu de temps après.
Je voulus me lever. Je haletais. Plusieurs autres gouttes tombèrent et je les reçus un peu partout sur le corps. Je regardai à nouveau le plafond, je vis les 2 sphères ainsi que plusieurs triangles difformes et alignés. J’avais l’impression que c’étaient des dents constituant une bouche de laquelle s’écoulait la substance de couleur olive. Je hurlai. Je me levai, aspirant à partir, mais au-moment où je me redressai, 2 espèces de pattes m'agrippèrent et me soulevèrent. Je fermai les yeux pour ne pas voir l’horreur à laquelle j’étais exposée. Je les ouvris quand même et vis de plus près les sphères et les triangles. L’ensemble formait une sorte de visage hideux, pareil à celui d’un monstre. Je me débattis, en vain. Je refermai les yeux et sentis une horrible odeur. J’eus envie de vomir, mais j’étais trop occupée à crier pour ça. J’avais l’impression que le monstre me mangeait... Que le plafond me mangeait...
Linda Magnetta 4GT1
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